On va gagner ?


Edito
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La France a donc gagné son match d’ouverture de la Coupe du monde de rugby face à la toujours redoutable équipe des All Blacks. Une victoire largement commentée dans la presse internationale, qui place désormais le XV tricolore en bonne place pour le titre mondial.

Qu’on soit joueur ou spectateur, qu’on ait l’esprit de compétition ou non, nous sommes tous portés par cette irrépressible envie de gagner. Les médecins vous diront que c’est une histoire de dopamine et de recherche de plaisir. Les psys, liées à notre instinct de survie. Les sociologues à nos comportements grégaires. C’est, dans tous les cas, une question d’instinct qui dépasse largement la seule enceinte des stades. Force est de constater que, dans le sport comme dans la vie, la compétition fabrique plus de perdants que de gagnants. Et si la société valorise le vainqueur, il faut aussi qu’elle sache quoi faire de toutes celles et ceux qui n’ont eu ni la chance, ni le talent de monter sur le podium.

Pour eux, il reste la parade absolue de Pierre de Coubertin, énoncée pour promouvoir les valeurs de l’olympisme : « l’important, c’est de participer ». On nous la rappelle depuis tout petit, chaque fois qu’on prend une gamelle. Pâle consolation qui, à l’heure du « winner takes all », ou même l’échec est positivé à grand renfort de développement personnel, soulève pas mal de doutes. Participer sans gagner ? Vraiment ?

Le problème, c’est que derrière le banquet des gagnants se dissimule beaucoup d’humiliation et de laisser pour compte. On peut même se demander si cette obsession de « la gagne » ne constitue pas la source même de tous nos déboires. « L’altruisme, le souci de l’autre s’est brisé quand on l’a mis dans des situations où la prospérité devient le résultat d’une course » rappelait l’économiste Daniel Cohen, disparu cet été. La compétition peut être un puissant révélateur de performance et un exhausteur de détermination. Mais elle ne peut être un moteur de société. Faut-il rappeler qu’Homo sapiens est une espèce qui s’en est sortie par la collaboration et l’entraide. Pas par la force.

Gagner est une tension permanente entre l’instinct et la construction sociale, l’émotion et la raison. C’est la richesse de cette ambiguïté qui nous a poussé à choisir ce thème pour notre prochain sommet de Val d’Isère. En revenant peut-être aux origines de la maxime de Coubertin, empruntée à l’homélie lors de la messe olympique des premiers Jeux de Londres, en 1908 : « l’essentiel, ce n’est pas d’avoir vaincu, mais de s’être bien battu ». L’important n’est donc pas de gagner, mais bien de lutter sans relâche contre toute forme d’adversité. Une nuance qui n’oppose plus les notions de compétition et de solidarité.

En attendant, on va un peu laisser parler nos émotions durant cette Coupe du monde en supportant nos équipes favorites. Et pour ce qui est de participer, rendez-vous à Paris du 11 janvier au 12 janvier prochains.

Bon(s) match(s).